GUIDE D’ÉCRITURE ET DE PRÉSENTATION D’UN DISCOURS

Tout le monde peut s’exprimer. Pourtant, bien dire les choses n’est pas à la portée de tous. L’éloquence relève d’un art qui ne s’acquiert qu’avec une constance dans la pratique. En effet, quand bien même que certaines personnes présenteraient des prédispositions pour exceller dans cet art, a priori, personne ne naît avec l’expression raffinée. Néanmoins, parler demeure le propre des humains. Certains en abusent au point de s’attirer des ennuis. Dans le même temps, il y en a qui sont timides qu’ils se gardent de s’exprimer. Retenons tout de même que cela est réversible. J’ai déjà vu des personnes surmonter leur timidité en participant par exemple à des compétitions où il était question de présenter des discours.

Le présent module qui traite de l’écriture d’un discours et de sa présentation se veut être un guide d’apprentissage. Il est destiné à ceux/celles qui se préparent pour des concours d’art oratoire ou d’éloquence. Il sera également d’une grande utilité à toutes ces personnes qui désirent apprendre à produire et tenir un discours cohérent.

Le plan de ce module se décline comme suit : la première partie est consacrée à la présentation des étapes qui caractérisent l’avant et le pendant de l’écriture d’un discours. La seconde porte sur les éléments qui concourent à la réussite d’un exposé oral.

I – COMMENT PRODUIRE UN DISCOURS COHÉRENT

Savoir clairement de quoi l’on veut parler 

Toute prise de parole se construit à partir d’un sujet ou d’un thème. Bien comprendre le sujet ou le thème permet de savoir clairement de quoi l’on parlera. Pour y arriver, il faut commencer par rechercher le ou les sens des différents mots-clés du libellé du sujet. Lorsque cet exercice de compréhension est bien réalisé, la reformulation du sujet vient tout naturellement. Aussi, permet-il également de situer les possibles angles de réflexion.

Ex. Le travail des enfants doit être réglementé

Une bonne compréhension de ces mots et expressions du libellé vous aidera à bien traiter ce sujet.

Identifier l’objectif de sa prise de parole

Voudriez-vous parler pour informer, dénoncer, revendiquer ou pour distraire ? Il est important d’identifier l’objectif de la prise de parole. Cela permet de définir le style d’écriture du discours. Ce choix du style est également opéré en fonction du type de sujet. Ainsi, un discours dont l’objectif est de faire rire ne sera pas écrit et délivré dans un même registre qu’un autre discours dans lequel l’orateur entend exprimer son indignation face à une situation révoltante. Toutefois, il est également possible d’adopter un style d’écriture qui emprunte à tous les registres possibles (satire, humour, plaidoirie, témoignage, etc.). Confère vidéo ci-dessous.

Mener une réflexion préalable sans consulter des sources

Cet exercice peut être fait en solo. Il s’agit essentiellement de prendre un moment pour réfléchir par soi-même sur le sujet. Par exemple, prendre un stylo et commencer par noter tout ce que nous inspire le sujet. Il revient surtout donc de mettre à contribution sa culture personnelle. Nul besoin de s’efforcer de structurer sa pensée à cette étape. Par ailleurs, il peut être aussi souhaitable de faire cet exercice avec un proche. Cela vous donne l’occasion de confronter les idées pour en juger de leur pertinence. 

En fait, votre intelligence serait directement limitée si vous démarrez votre réflexion avec les analyses des autres. Mais lorsque vous réfléchissez d’abord par vous-même, plus tard, vous découvrirez d’autres manières d’aborder le sujet auxquelles vous n’auriez pas pensé si vous vous y étiez jetés en partant des analyses publiées sur internet.

S’informer/se documenter sur le thème ou le sujet

Il n’est pas évident que notre réflexion préalable soit suffisante pour cerner le sujet de bout en bout. Quand bien même que nous aurions une parfaite compréhension du thème, il est aussi important de conduire une recherche documentaire ou de consulter des sources d’information crédibles (articles, mémoires, encyclopédies, podcasts, vidéos, documentaires) pour nous renseigner sur tout ce qui a été déjà dit, écrit ou fait sur ce même sujet.

Toutefois, il est important d’exploiter judicieusement les informations collectées. En fonction de votre compréhension du sujet, certaines informations seront plus pertinentes à exploiter que d’autres. Il est donc préférable d’exploiter les informations que l’on juge intéressantes ou pertinentes pour construire l’argumentaire. La pertinence d’un argument se mesure à sa justesse au regard du sujet et dans la difficulté à le réfuter. Il faut également diversifier et confronter les sources d’information. Cela à pour bénéfice d’aboutir à une argumentation très enrichie, solide et bien documentée.

Bien ficeler le discours

C’est à cette étape que commence la rédaction proprement dite de votre discours. Lorsque vous y êtes, on peut considérer que vous avez bien compris votre sujet, que vous savez ce que vous voulez dire et comment le dire. Ainsi, vous vous servirez de vos notes, des informations que vous aviez collectées et traitées le long des étapes précédentes pour construire des paragraphes cohérents. Pour ce faire, il convient de procéder à une hiérarchisation des arguments. Cela revient d’abord à les cataloguer puis ensuite à positionner les plus pertinents dans les premiers paragraphes du discours.

En outre, chaque paragraphe sera construit avec une et une seule idée. Cette idée sera étayée au moyen d’arguments et illustrée au bénéfice d’exemples. Il faudra également veiller à la cohérence entre les arguments. Cela vous évitera l’autocontradiction. De même, il conviendra de recourir à des connecteurs logiques pour relier les arguments à l’intérieur des paragraphes. Enfin, on se gardera de faire l’impasse sur les transitions quand il s’agira de passer d’une idée à une autre. Le respect scrupuleux de toutes ces recommandations est un gage à l’écriture d’un discours cohérent, clair et digeste.

NB. Votre but est de vous faire comprendre, pas de mystifier vos interlocuteurs. Pour ce faire, adoptez un vocabulaire simple et accessible. Évitez les thèmes techniques. Le cas échéant, définissez-les.

À présent, nous considérons que votre discours est ficelé de bout en bout et donc prêt. Il ne vous reste plus maintenant qu’à le présenter devant ce parterre d’interlocuteurs. Vous ne voudriez certainement pas faire piètre figure devant eux. Que faire alors pour les tenir en haleine ? C’est ce que nous verrons dans la seconde partie de ce module.

II- TRUCS ET ASTUCES D’UNE PRÉSENTATION RÉUSSIE

La réussite d’un exposé oral dépend du niveau de préparation de l’orateur. À l’exception des interventions impromptues qui requièrent une capacité d’improvisation, une communication réussie est celle qui a été bien préparée. La préparation ici emporte la maîtrise du sujet et du discours rédigé, mais pas que. Il faut également savoir combiner les éléments prosodiques et sonores. Il s’agit notamment du volume, du ton, du rythme, de l’articulation et de l’élocution qui rendent audible et vivant le discours. De même, pendant la présentation, il se révèlera exquis de mettre à contribution les éléments englobant la prestance (regard, posture, gestuelle) qui accompagnent le message.

Nous allons prendre chacun des éléments ci-dessus mentionnés et les expliciter. Mais avant, intéressons-nous d’abord à la maîtrise de l’objet de la présentation.

La maîtrise du sujet et du discours

Pendant une audition, le jury ne permettra pas à l’orateur de faire lecture de son discours. Comme c’est le cas généralement pendant les concours d’éloquence, il est demandé aux candidats-es de présenter leur texte sans support papier. Pour cette raison, le travail de préparation doit être conduit avec méthode et rigueur. En effet, mieux vous comprenez le sujet, plus vous êtes à l’aise d’en parler et donc meilleure est votre présentation.

Toutefois, ne bûchez pas un discours à présenter sans support. Cela peut être suicidaire. Le stress à lui seul suffit pour vous causer des trous de mémoire. En conséquence, vous vous plantez, vous devenez nerveux, vous transpirez. Le public vous applaudit en se disant que cela vous aiderait à retrouver vos idées. Au contraire, cela vous rendra encore plus nerveux puisque vous avez besoin du calme pour vous remémorer le mot ou le groupe de mots qui vous empêche d’avancer. Finalement, le jury vous prie de déposer les armes et bienvenues les larmes. À qui la faute ? À vous, naturellement. Voyons. Fallait pas faire du par cœur.

Cependant, il existe des personnes avec d’excellentes capacités de mémorisation, capables de rendre sa faille, peu importe les circonstances, un texte qu’elles ont appris par cœur. Si vous appartenez à cette catégorie de personnes, tant mieux. Mais en réalité, maîtriser votre discours ne vous revient pas forcément à le bûcher. Il s’agit plutôt d’imprimer dans votre esprit les idées phares développées dans chacun des paragraphes et leur ordre de présentation. Cette méthode vous permet d’avancer même lorsque vous ne vous souvenez plus exactement des mots que vous aviez utilisés en rédigeant vos paragraphes. Cependant, il vous serait difficile de réussir cet exercice si vous ne disposez pas d’un vocabulaire très riche. Normalement, pour un discours rédigé par vos soins, vous n’aviez plus besoin de le bûcher. C’est déjà dans votre tête.

À présent, nous abordons les éléments prosodiques et sonores déjà énoncés plus haut.

Les éléments prosodiques et sonores

Il s’agit essentiellement du volume, du rythme, du débit, du ton, de l’intonation et du timbre.

Le volume

Le volume est caractérisé par la force de la voix et peut-être fort, moyen ou faible. Il faut savoir ajuster le volume selon l’auditoire et les éléments sonores ambiants : plus doux lorsque le public est restreint et les sons ambiants limités, plus élevé lorsque l’auditoire est plus étendu ou que les sons ambiants sont plus dérangeants. Cependant, élever le volume de la voix ne revient pas à crier. L’important est de s’assurer que les interlocuteurs entendent et comprennent bien le message et les sentiments qu’on cherche à leur communiquer.

Le rythme

Le rythme est créé par l’alternance plus ou moins régulière des syllabes accentuées, des syllabes inaccentuées et des pauses. Lors d’une communication orale, on peut lui donner diverses caractéristiques : calme et posé, rapide et dynamique, saccadé et nerveux, etc. Par rapport au rythme, on notera également les pauses qui serviront à laisser le temps à l’auditoire d’assimiler le message. On s’en servira aussi pour marquer les grandes parties de la présentation et pour mettre en évidence certains propos que l’on considère comme importants. Enfin, on peut faire une pause pour souligner la gravité de certaines paroles.

Le débit 

Le débit renvoie à la vitesse d’élocution, la vitesse à laquelle le message est dit. On dira qu’un locuteur à un débit lent, moyen ou rapide lorsqu’on veut spécifier sa manière de parler. Cela pourrait également être lié à l’intention de l’auteur : lent pour s’assurer de la compréhension du message ou pour réconforter ; moyen pour informer, compléter, préciser ses propos ; rapide pour stimuler ses interlocuteurs, pour se montrer dynamique ou entraînant. Ainsi, le débit peut très bien varier lors d’un exposé selon les intentions de l’émetteur.

Le ton

Le ton se manifeste généralement par une variation de la hauteur de la voix au cours de l’articulation des mots. Il sert à marquer l’expressivité et est étroitement lié à l’intention, à l’état d’esprit ou aux sentiments de l’auteur. On peut parler alors de tons : neutre (informer), humoristique (divertir), didactique (instruire), favorable (convaincre), défavorable (combattre), élogieux, alarmiste, ironique, hautain, moqueur, sarcastique, distant, sec, familier, solennel, froid, etc. Le choix du vocabulaire et certaines tournures de phrases donnent le ton à la communication. Ainsi, lorsqu’un auteur veut convaincre ses destinataires, il emploiera des termes persuasifs (verbes, qualificatifs, adverbes, etc.)

L’intonation

L’intonation correspond à la variation de la hauteur de la voix au cours de l’énonciation. En français, par exemple, un énoncé comme (il réfléchit), articulé avec une courbe intonative montante puis descendante, est habituellement perçu comme déclaratif. Le même énoncé, prononcé avec une courbe montante en finale, est plutôt interprété comme une question (Il réfléchit ?). Ainsi, on pourra déterminer l’intention de l’émetteur (déclarer, ordonner, s’exclamer ou interroger par exemple) ou de retenir les points essentiels du message selon l’intensité qu’il mettra à prononcer certains énoncés (marque l’insistance). Une bonne intonation aide à maintenir l’intérêt des auditeurs puisqu’elle peut éviter un ton monotone ou monocorde en accentuant certaines syllabes.

Le timbre

Le timbre est la sonorité particulière d’une voix. En général, un locuteur à la voix claire et agréable fera passer un message plus facilement qu’un autre dont la voix est moins harmonieuse. Il arrive aussi qu’un timbre de voix bien particulier attire davantage l’attention des interlocuteurs.

NB. Ne pas avoir une belle voix n’est pas un handicap à la réussite d’un exposé oral. Le tout dépend de la façon dont vous vous servez de votre voix naturelle. Ne cherchez pas à changer drastiquement votre voix. Ce serait une vaine entreprise. Efforcez-vous plutôt de bien articuler et d’être convaincant. À défaut de mettre les formes et les artifices, il faut pouvoir se faire entendre et comprendre.

Les éléments de la prestance

Ils regroupent la posture, la gestuelle et le regard.

La posture

La façon de se tenir lors d’un exposé est fondamentale si l’on veut impacter l’auditoire. Ainsi, un orateur qui adopte une posture droite et ouverte sera plus proche de son public. On peut voir sa détermination et peut-être même sa confiance en lui. Une posture plus molle marque le manque de confiance et la fermeture sur soi.

La gestuelle

Les gestes peuvent servir à exprimer un état d’esprit ou une émotion de sorte à passer le message désiré. Ils marquent parfois les grands points d’une présentation. Toutefois, ils peuvent également révéler le stress de la personne qui parle. Imaginez un orateur qui froisse ses feuilles de note ou qui joue avec un crayon. Ces gestes dénotent de sa nervosité.

Lorsque les gestes sont exagérés, ils peuvent détourner l’attention du public. Ainsi, l’orateur perd l’intérêt de son auditoire. L’impact de son discours diminue. Le discours même se vide de son sens premier et se transforme en spectacle ; le public étant plus accroché à ce qu’il fait qu’à ce qu’il dit. Un conseil : faites des gestes appropriés et mesurés.

Le regard

Vous ne ferez pas une présentation orale en ayant le regard fuyant, fixé sur le plafond ou sur le sol. Votre regard doit être orienté sur l’auditoire. Le contact visuel vous connecte au public. Il vous permet de suivre ses réactions, de lui transmettre vos émotions et enfin de vous assurer que votre message passe.

Si vous n’arrivez pas à soutenir vos interlocuteurs du regard, fixez alors leur front. Fuir le public du regard est généralement interprété comme un manque de confiance et d’assurance en soi. Vous ne voudriez pas faire piètre figure devant vos interlocuteurs, alors, tenez-vous bien droit, bombez le torse (si nécessaire), fixez-les et parlez.

Conclusion

Dans toute entreprise humaine, il faut croire en ses capacités pour réussir. Cela vaut également pour toute personne qui désire parfaire son expression orale. En effet, croire en vos potentialités vous aidera à vous affranchir du carcan de la timidité et de la peur de vous affirmer. La lecture est par exemple une activité ludique qui peut aider à l’enrichissement du vocabulaire et de la culture personnelle. Un vocabulaire varié conjugué avec une riche culture personnelle booste la confiance en soi. Plus vous disposez de connaissances très étendues sur divers sujets, mieux vous êtes à l’aise à en parler. Le reste viendra naturellement avec la pratique. À ce propos, retenez que les notions et techniques d’écriture et d’expression orale développées dans le présent module ne sont pas à bûcher, mais plutôt à appliquer comme des formules mathématiques afin d’être maîtrisées à la faveur de la pratique.

Jean-Claude de Prince HOUESSOU

Journaliste-Mondoblogueur