La « béninoiserie » : regard d’un Béninois
La « béninoiserie » est ce vocable péjoratif auquel nous sommes habitués depuis les années 1990 au Bénin. Apparu dans le contexte de la conférence des forces vives de la Nation de février 1990, ce mot a réussi à se faire une « bonne mauvaise place » dans la société béninoise. Toutefois, la définition qui lui est donnée a induit une bonne partie des habitants de la planète en erreur.
Aujourd’hui, tout le monde pense que la « béninoiserie » est la marque exclusive des Béninois. Certains pensent même que tous les 12,12 millions d’âmes qui vivent dans ce pays sont des adeptes de la « béninoiserie ». Dans tous les cas, je ne voudrais pas relancer ce débat. D’ailleurs, mon objectif n’est pas de fournir des statistiques sur le nombre de béninois qui ont des traits de » béninoiserie ».
Mon but, c’est de faire comprendre que la « béninoiserie » n’a pas une nationalité. Pour mieux dire, il s’agira de montrer que ce dont nous parlons n’est pas le propre d’une société donnée. Mais avant, cherchons à savoir ce que dit le dictionnaire du mot.
« Béninoiserie », selon Wiktionnaire
Selon ce dictionnaire libre, la « béninoiserie » est un « ensemble de traits de caractère supposé associé aux Béninois ». Le wiktionnaire ne s’est pas arrêté à cette définition. Il est allé plus loin, avec des détails précis sur les traits de caractère dont il s’agit. Voici ce qui est dit de ces traits de caractère : « Médisance, croc en jambe, coup bas, sorcellerie ou même élimination physique. « La « béninoiserie » est un véritable phénomène de société au Bénin. Forme paroxysmique de la jalousie, elle consiste à faire tout son possible pour empêcher de réussir un tiers d’évoluer ».
De cette définition détaillée se dégage une évidente conclusion. Dans le langage de chez moi, pour tirer cette conclusion, on dira que « la « béninoiserie » est la chose des Béninois ». En réalité, le Wiktionnaire n’a pas tort. Il n’a fait que transposer ce que dit la majorité des gens d’ici et d’ailleurs. Mais dans tout ceci, je me pose une question fondamentale.
La question fondamentale

Est-ce que la médisance, le croc en jambe, le coup bas, la sorcellerie, le meurtre, la jalousie sont des phénomènes observées exclusivement au Bénin ? Je me le demande toujours. En effet, si chaque citoyen du monde peut se poser cette question et arriver à se convaincre de la réponse, alors nous aurons avancé en quelque chose et cessé d’étiqueter le Bénin comme le pays de tous les maux.
Ma conception de la « béninoiserie »
Comme vous l’avez sans doute compris, ma conception de la « béninoiserie » est large et va au-delà du Bénin. Il n’y a pas qu’au Bénin que des gens s’entretuent, que des personnes se jalousent ou font semblant de s’aimer. C’est partout dans le monde. Je vais vous le dire, la discrimination raciale est une manifestation de la « béninoiserie », les conflits tribaux ou ethniques, en sont autant. De même, les assassinats politiques, les violations des droits de l’homme, les violences basées sur le genre, la destruction de l’environnement et des écosystèmes sont aussi d’autres formes par lesquelles se manifestent la « béninoiserie » ; pour la simple raison que tous ces phénomènes sociaux ne procurent pas de bien à l’homme, encore moins à sa société ; et sont observés dans toutes les sociétés.
On pourrait accepter, si l’on était encore dans les années 1990, les postulats qui définissent la « béninoiserie » comme un bien exclusif et inaliénable des Béninois. Mais aujourd’hui, il convient de déconstruire ces postulats et de dépasser ces mythes qui ne favorisent pas l’union nationale. Comprenons juste que la « béninoiserie » est ce mot qui décrit un phénomène plus ou moins planétaire et non la marque exclusive d’un seul peuple.
À mes compatriotes, je souhaiterais que nous cessions de donner raison à ceux qui continuent de penser que la « béninoiserie » est notre chose, même si nous ne pouvons pas totalement le nier. Déjà, essayons de nous donner une définition positive du mot loin de toutes ses connotations négatives. On pourrait peut-être commencer par dire que la « béninoiserie », c’est l’amour du prochain, la tolérance, le respect de l’autre dans sa différence et pourquoi pas, le travail bien accompli.
À vous autres, nos frères et sœurs en humanité, nous vous invitons à suivre ce mouvement pour un plus grand changement des conceptions sur la « béninoiserie ».
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